Le jeudi 27 février 2025, Seydou Keita, ancien footballeur devenu industriel, fait visiter son usine à 14 milliards FCFA à des activistes et influenceurs en vogue à Bamako. L’ancien « 12 National » déclare que son usine est « par un Malien pour les Maliens ». Derrière cette façade de patriotisme se cache pourtant un jeu malsain qui vise à réduire les femmes rurales en esclave des temps modernes.

 « Je préfère fermer mon usine que vendre mes produits plus chers aux Maliens », a déclaré Seydoublen (Seydou clair) aux acteurs de médias sociaux dont les micros arboraient son cou pour l’occasion. « On m’accuse, mais je ne fixe ni les prix des matières premières ni les prix de ventes de produits », se dédouane le nouvel industriel. Et d’ajouter par rapport au karité, « le gouvernement dit d’acheter le kilo d’amandes de Karité à 350 FCFA, et après transformation de vendre le litre d’huile à 900 FCFA », détaille-t-il.

Dans sa campagne, le footballeur a dénoncé « les entraves contre son usine ». Pourtant, il a préféré son pays plutôt que Dubaï ou un autre pays voisin « malgré le tapis rouge » qu’on lui a déployé.

Il n’en fallait pas plus pour que les réseaux sociaux s’enflamment. Chacun y va de son commentaire. « Le Malien n’aime pas le Malien, ils veulent détruire son usine » ; « je ne consommerai désormais que l’huile de Seydou Keita ». « Dites-moi où on trouve l’huile SDA ? ».

 

Les non-dits

 

Derrière cette campagne avec des influenceurs en poche se cache une réalité. L’entreprise SDA de Seydou Keita peine à avoir la matière première pour sa production notamment les amendes de Karité. L’huile produite n’est même pas encore mise sur le marché.

Pourtant, le 03 octobre 2024, le ministre de l’Industrie et du Commerce interdit à l’exportation l’amende Karité, le soja, le sésame et l’arachide, les matières premières nécessaires au fonctionnement de l’usine de Seydou Keita. Qu’est-ce qui n’a pas marché ?

« En vérité, c’est Seydou Keita qui a demandé au ministre du Commerce de suspendre l’exportation des amandes de Karité, arachide, soja et du sésame », a accusé Kadidiatou Lah, présidente des acteurs de la filière Karité, arachide, soja et du sésame.  Face caméra, la brave dame affirme d’abord parler avec Doucouré, le conseiller de Seydou Keita sur le prix du kilo d’amande de karité.

Pour le kilo vendu à 600 FCFA, les acteurs de la filière ont proposé de vendre le kilo à 350 FCFA. « Pas question d’acheter à ce prix ! », crie Doucouré. Et de lancer aux femmes, acteurs de la filière : « vous ne cultivez même pas le karité, vous allez juste ramasser les noix de karité, même à 150 FCFA, ça fera votre affaire ». Doucouré a aussi menacé de recruter lui-même des femmes à 50 000 FCFA le mois pour ramasser les noix.

Kadidiatou Lah sentant le danger venir, entre en contact avec Seydou Keïta. Ce dernier s’étonne d’abord de comment la dame a eu son numéro. La dame se plie à l’interrogatoire et arrive à demander à Seydou d’accepter 350 FCFA le kilo d’amande de karité. Seydou fait pire que Doucouré. « Je vais faire fermer les portes », lance-t-il à la vieille Dame. Aussitôt dit, aussitôt fait. Le ministre suspend tout « pour l’intérêt national », vante-t-on.

Résignées, Dame Lah et ses braves femmes décident de ne pas brader le fruit de leur labeur à vil prix. Elles ont préféré laisser les amendes pourrir que d’accepter que la misère imposée par les tout-puissants. « Personne ne va nous piétiner, chacun défend ses intérêts », a prévenu Kadidiatou Lah.

MalinewsTV.com